Tempo rubato

Parce que ça me chante!

Et j’ai signé

J’invite les visiteurs de ce blogue à se reporter à la section voisine, sous le titre Et j’ai signé. Il s’agit d’une compilation de mes articles publiés, des plus récents aux plus anciens. Chaque titre conduit à une introduction; un hyperlien vers le texte complet en PDF est laissé au bas de ce texte. Bonne lecture!

Ils vécurent heureux…

«Ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants…» Un conte de fée moderne circule ces jours-ci sur Facebook (oui, je l’avoue, j’ai réactivé mon compte). Il y est question d’une jeune femme, heureuse de ne s’être jamais mariée. Elle s’amuse, baise et accomplit toute autre chose comme ça lui plaît sans rendre de compte à qui que ce soit, dépense son argent à sa guise, et si elle lave et repasse, ce n’est que pour elle. Malheureusement, le mythe du prince charment qu’on nous a enfoncé dans le crâne dès le plus jeune âge nous a tenues loin de cette félicité.

Pourtant, je fête aujourd’hui mon cinquième anniversaire de mariage, et il s’avère que je ne me sens aucunement envieuse du sort de cette jeune femme. Alors je me demande: le couple est-il nécessaire au bonheur? Non pas que ce soit tous les jours tout rose: des hauts, des bas, nous en connaissons et en connaîtrons encore ensemble, je vous en passe un papier! Mais c’est bien connu, les gens mariés sont plus nombreux à se dire heureux, et pour les hommes, un autre point boni: ils vivent plus vieux! Mais au fond, qu’est-ce qui, dans le fait de vivre en couple, améliore la qualité de la vie?

C’est vrai que le couple a ses contraintes. Qu’il est parfois difficile d’y trouver un équilibre satisfaisants entre les partenaires. Qu’éduquer ensemble des enfants – alors que nos propres expériences de l’enfance divergent – comporte une multitude de défis. Et cela, sans parler du rôle de la séduction, de la capacité de faire jaillir l’étincelle à nouveau et sans cesse avec la même personne… Alors pourquoi s’infliger tout cela?

Parce que le bonheur n’est pas un produit de consommation rapide et jetable. Et si la personne célibataire peut tout aussi bien le trouver dans sa vie, ce sera au prix des mêmes efforts nécessaires au couple heureux:  savoir tisser des liens intimes, profonds et durables avec d’autres personnes. S’oublier parfois, ou accepter de faire passer ses propres besoins au second plan, pour rendre la vie des autres meilleure. Apprendre à devenir meilleur en se frottant à l’expérience d’autrui,  sachant mettre l’orgueil de côté. S’entraîner à écouter, et peser ses mots avant de parler. S’ouvrir à la beauté de l’autre et la laisser pénétrer dans notre cœur, se laisser toucher par elle. Se réjouir du bonheur des autres pour doubler sa joie, partager leurs peines pour alléger nos fardeaux. Voilà, je crois, ce qui fait les gens heureux.

Il se trouve que le couple et la famille procure l’environnement tout désigné pour vivre ces expériences fort utiles à la croissance personnelle. La proximité physique et émotive, le quotidien, le partage matériel, les innombrable mais inévitables compromis à faire et à renouveler… tout est là pour chercher le bonheur activement! Et savez-vous quoi? On peut le trouver… Il est là, je le vois du coin de l’œil. Il pose ses pneus d’étés avant que nous partions pour une petite escapade en amoureux.

Bon anniversaire à mon prince charmant!

Cellulaire au poing

Le film: Grace, Milly, Lucy...

Ce soir, à Télé-Québec, j’ai vu le documentaire de l’ONF réalisé par Raymonde Provencher: Grace, Milly, Lucy… des fillettes soldates. Bouleversant. L’ai regardé avec ma fille de 14 ans qui, quelques minutes plus tôt, magasinait en ligne en vue de se procurer un téléphone cellulaire. C’est quoi le rapport? Le reportage diffusé à Enquête, intitulé Du sang dans nos cellulaires nous mène sur une piste. Le film qu j’ai d’abord vu concerne des filles de l’Ouganda enlevées à 9 ou 10 ans pour combattre sous les ordres des rebelles au Soudan; celui qui est en ligne ici tourne autour d’une guerre civile en République démocratique du Congo, nourrie par l’exploitation d’un minerais essentiel à notre téléphonie sans fil. Comment demeurer indifférent? Depuis le confort de nos vies hyperactives, chacun de nos gestes porte ses conséquences. Ces trois jeunes filles soldates – Grace, Milly, Lucy –  ou bien les trois nôtres, ce sont les mêmes. Une différence: l’arme qu’on a mis entre leurs mains.

Religion et politique: malaise

Le maire de Saguenay financera sa procédure d'appel à l'aide de dons privés.

Le maire de Saguenay, Jean Tremblay, est «en croisade», pour reprendre l’expression qui fait image. Les traditions religieuses en place sont ébranlées par un jugement du Tribunal des droits de la personne en faveur du Mouvement laïque québécois et du citoyen Alain Simoneau: la prière qui précède les assemblées publiques du conseil municipal ainsi que les signes religieux exposés dans la salle du conseil doivent être éliminés. D’un côté, on fait valoir la tradition catholique du milieu et la liberté de pratique religieuse des élus, de l’autre, on réclame le respect de tous les citoyens, sans discrimination liée à la religion, par les institutions publiques et leurs représentants. Trouvé dans son tort par le tribunal, le maire de Saguenay veut en appeler de la décision qui l’intime de verser d’importantes sommes en dommages moraux et punitifs au demandeur. Tout ceci se déroule au niveau municipal, dans une région du Québec à forte majorité catholique.

À un autre niveau de gouvernement, une joute politico-religieuse se déroule de manière un peu plus insidieuse depuis plusieurs années. Des journalistes qui observent la scène fédérale s’interrogent sur l’influence importante des groupes évangéliques – souvent identifiés comme «la droite religieuse» – auprès du gouvernement conservateur de Stephen Harper. Des enjeux politiques tels les unions entre personnes de même sexe, le droit à l’avortement, l’aide internationale, l’environnement et même la politique étrangère (notamment en ce qui concerne Israël) seraient traités par plusieurs membres du gouvernement suivant des considérations religieuses. Même la récente tourmente dans laquelle s’est plongée Bev Oda autour du financement de Kairos (un organisme chrétien œcuménique – de gauche, pourrait-on dire – d’aide internationale) laisse perplexe devant les motivations de la ministre. Quelqu’un a-t-il remarqué que le site de l’organisme en question propose entre autres une «réflexion sur la foi chrétienne et les sables bitumineux»? Mais c’est plutôt sur des allégations d’antisémitisme que le financement gouvernemental jusque-là accordé par l’ACDI lui a été refusé.

D’une situation comme de l’autre se dégage un malaise. On a beau dire que la religion n’a pas sa place dans la sphère publique, que les croyances et les pratiques religieuses doivent rester dans le domaine privé, on sait bien qu’il y a là une utopie. Tout croyant pourra reconnaître qu’il est difficile d’être religieux chez soi et de se détacher de ses convictions aussitôt hors du temple ou de la maison. Même chose pour l’athée – si on accepte de considérer l’athéisme comme un système de croyances – qui transporte sa vision non religieuse du monde dans toutes ses sphères d’activité.

Que des gens de toutes croyances s’engagent en politique, c’est le propre de la démocratie de droit où la liberté de conscience règne. Que leurs convictions religieuses motivent en partie cet engagement en vue du bien commun, cela se conçoit. Que ce désir de servir l’ensemble des citoyens au nom d’une valeur suprême se manifeste dans une prière faite publiquement, dans un cadre institutionnel civil, et voilà que la ligne qui doit tenir le politique et le religieux séparés commence à être transgressée. Cela contrevient-il au droit de quelqu’un? Et l’empêcher ne brime-t-il pas celui qui veut exercer sa foi dans son intégralité? C’est dans de telles situations qu’on doit trancher entre la liberté des uns qui finit là où commence celle des autres, et c’est ce que le Tribunal des droits de la personne a fait. Se braquer devant cette décision ne peut qu’alimenter l’intolérance religieuse.

Que des élus exercent leurs fonctions de représentants de la population en appuyant leur engagement sur une foi profonde, ce peut-être pour le bien de tous. Que des décisions politiques reflètent une idéologie partisane dictée par des principes religieux, c’est autre chose. Même principe: que des groupes de pression de toute allégeance (religieuse ou politique) exercent leurs droits de représentation auprès des élus de manière juste et équitable, c’est dans la nature d’un système fondé sur la représentation des citoyens. Mais qu’un mouvement religieux donné ait un accès privilégié à l’appareil gouvernemental (tant chez les élus que chez les hauts fonctionnaires), là réside le problème.

C’est pourquoi il importe d’ajuster les mécanismes démocratiques et légaux qui peuvent contrôler de telles dérives. Les chartes de droits en sont un outil, car elles protègent la liberté de conscience de personnes. Le système électoral en est un autre, car il nous donne la possibilité de choisir nos représentants. Les règles entourant le lobbyisme en sont aussi, mais encore faudrait-il que les groupes de pression d’allégeance religieuse y soient soumis au même titre que ceux d’intérêts financiers. Mais contrairement à ceux qui croient que la religion doit rester dans la sphère privée, cependant, je pense que le citoyen a tout intérêt à ce que les motifs religieux des élus soient connus, voire manifestés publiquement, plutôt que mis en exercice en catimini sous de faux principes. Vivre dans une société laïque ne signifie pas bannir toutes les conceptions religieuses du domaine social. Mais c’est en accepter la diversité, la coexistence et le fait que ces conceptions religieuses n’aient pas préséance sur les droits civils et sur le bien commun.

La vie sans Facebook

Nous avons puni notre adolescente: puisqu’elle passait trop de temps devant l’ordinateur (à notre humble avis de parents), soit à clavarder soit à entretenir son réseau social d’amis, et qu’elle avait du mal à respecter les limites établies, la voilà privée d’ordinateur (et de ses dérivés sur IPod).  Initialement, pour 24 heures. Puis, elle s’est attiré une peine sans sursis de deux semaines, après avoir fomenté une tentative d’évasion pour laquelle elle a été prise en flagrant délit. Non encore matée, la mutine met en ligne un statut hier soir, disant: «C’est plate la vie sans Facebook». Sans doute qu’elle va me bannir de son cercle d’amis après la publication de ce billet, mais tant tant pis. Car j’en arrive à un point de saturation et je songe moi-même à retirer toute trace de mon passage sur le réseau social.

Tout a commencé au tournant de l’année. J’avais bien un compte Facebook depuis… – quoi? trois ans! – mais j’y étais très peu active. Quelques rares statuts m’avaient servi notamment à diffuser plus largement la publication d’un article ou d’un nouveau billet sur ce blogue, à annoncer un événement digne de mention ou encore à faire un appel à tous afin de trouver une source dans la recherche d’un sujet. Mais vint mon 40e anniversaire, et je fus soudainement tentée par le démon du midi. Photos de la fête à partager, histoire de la continuer un peu et de remercier celles et ceux qui y étaient. Puis je me mis à observer de plus près les interactions de mes «amis», parfois même à les commenter. «Bien!», me dis-je. Voilà une façon simple et économique de contrer l’isolement lié à ma condition de travailleuse autonome. Ma résolution pour 2011 était ainsi toute trouvée: devenir une vraie «facebookeuse»! C’est alors que mon réseau d’amis s’est mis à prendre de l’ampleur. S’y sont ajoutés anciens collègues, relations professionnelles, camarades d’université, sans oublier les amis de mes amis qui sont aussi mes amis. Un jeu de «Cherche et trouve» virtuel où l’on reprend contact le temps de répondre à une demande d’amitié. Mais comme la rose du Petit Prince, ces échanges sont bien éphémères…

Insidieusement, Facebook s’installe dans notre routine quotidienne. Comme se brosser les dents matin et soir ou donner à manger à son chien. Seulement, on s’aperçoit bien vite qu’il faut justement nourrir la bête pratiquement à la demande, car elle est gourmande! Le statut mis en ligne il y a trois heures sera vite relégué au bas de la page d’accueil de quiconque est un véritable membre actif du réseau. Car il faut se rendre à l’évidence: plus ce réseau est composé de gens intéressants, plus celui-ci exige de votre temps; et plus on a d’amis, moins on a de chances de consacrer du «temps de qualité» à chacun. C’est ainsi dans la vie, et pas autrement dans le réseau social. Comme on ne veut rien manquer, et surtout ne pas se faire oublier, on augmente la cadence. Mais la saucisse Hygrade a beau être fraîche (parce que plus de gens en mangent, c’est bien connu), on ne peut faire un régime de saucisses à hotdog sans un jour se taper une bonne crise de foie. Vient ce moment fatidique où il faut regarder la vérité en face: on est rendu à la limite de l’addiction. Alors, que faire?…

Ne reste plus qu’un choix: la modération ou la pure et simple abstinence. Mettre fin à toute tentation en s’éliminant du réseau, en disparaissant des carnets de tous et chacune. Ou revenir à l’ancien régime: ne publier que ce qui est vraiment utile pour une plus large diffusion, sans se mêler de savoir ce qui se passe dans la vie de tous nos amis, chaque jour et chaque heure qui passent. C’est une option un brin parasitaire quand on y pense (je ne veux pas savoir ce que vous avez à dire, mais au besoin, vous saurez ce que je pense) et, si tout le monde vivait sa vie Facebook comme ça, il n’y aurait plus que des messages qui passent dans le beurre, comme on dit. On s’en doute, il se fait déjà beaucoup de bruit pour rien dans nos pages, car innombrables sont les statuts qui n’attirent aucun commentaire, et inversement, les plus commentés ne sont pas toujours les plus édifiants. Et ainsi va le débat intérieur qui pourrait être sans fin devant cette bête dévoreuse de temps et d’autres sources d’énergie non renouvelable.

Peut-être en fin de compte que ma fille a raison: «La vie est plate sans Facebook». Mais comme je suis sa mère et que je me dois de prêcher par l’exemple, je vais plutôt m’efforcer de prouver le contraire. Je vais de ce clic partir à la recherche de l’onglet mystérieux (et sûrement bien caché) par lequel mon profil et mon réseau se déliteront de la toile. Je n’aurai pas tenu ma résolution 2011. Et ma vie sociale ne s’en portera que mieux, j’ose le croire.

P.S. Pour avoir des mises à jour de mes prochaines publications, abonnez-vous à ce blogue . Elles ne seront plus publiées sur Facebook.

Stop ou… encore?

Deux mois de silence demain. Je me rappelle, dans un cours d’essai littéraire, au Cégep, j’avais eu un travail à composer sur le thème «Lire – vivre – écrire»; il fallait se situer en relation avec ces trois verbes et les relier entre eux. C’est ce qui me revient en pensant à ce blogosilence. Je ne suis pas une vraie blogueuse (serais-je en proie au syndrome de l’usurpateur?). Je ne sens pas ce feu allumé qui me pousserait continuellement à vouloir partager mes réflexions sur le monde avec l’univers entier. Depuis deux mois, j’ai été occupée à vivre plus qu’à penser en vue d’écrire. C’est vrai, vivre permet souvent d’écrire car, hors de l’action du monde sur soi, ou de soi sur le monde, difficile de trouver matière à réflexion. Mais parfois, ce que l’on vit n’appartient pas au monde. C’est en soi, pour soi, dans l’intime de sa propre vie, de la vie des autres tout proches… et cela porte aussi à l’écriture, mais ce n’est pas la même. Celle-là se dérobe au regard des autres. Aujourd’hui, j’avais envie de titrer ce billet: «Sabordage». Il faut bien faire quelque chose avec cet espace si on n’a plus l’intention de rien en faire. Le jeter, le recycler, le propulser dans un trou noir du cyberespace. J’ai envie de faire une expérience peut-être différente, plus dans les mots et la vie que dans l’action et la réflexion. Je laisse la page ouverte pour l’instant. J’aimerais bien recycler la section «Et j’ai signé» quelque part, puisque c’est un peu mon portfolio virtuel. Pour le reste, je verrai. Tempo rubato.

Québec et Kahnawake, même combat?

Dans une lettre intitulée «À la défense de Kahnawake», Louis Bernard qui se présente dans les pages du Devoir à titre d’ex-candidat à la direction du Parti Québcois, compare l’avis d’expulsion des non-Mohawks de la réserve de Kahnawake et l’adoption de la Charte de la langue française au Québec. Je ne crois pas qu’on puisse comparer la situation des Mohawks et celle des Québécois. Et si l’on devait le faire, on ne pourrait soutenir, en toute honnêteté intellectuelle, qu’expulser de son territoire des personnes d’origine différente soit un geste de protection culturelle «instinctivement» compréhensible aux yeux des Québécois. Le Québec d’aujourd’hui, tout francophone qu’il soit, s’est modelé avec (et non pas malgré) l’intégration de personnes d’origine française, bien-sûr, mais aussi irlandaise, italienne, juive, vietnamienne, colombienne, haïtienne, et j’en passe. Si le Québec avait posé un «geste de défense identitaire» analogue à celui qui se joue à Kahnawake, il n’y aurait jamais eu 6 millions de personnes parlant français et habitant le Québec en 2010. Le repli identitaire n’a pas été, n’est pas et ne devrait pas être une solution de survie culturelle pour le Québec. À savoir s’il en est une pour les autochtones de Kahnawake ou d’ailleurs, c’est une autre question qu’il leur revient de bien mesurer dans le respect des lois et des droits. Clin d’œil ironique: l’article soulignant le 20e anniversaire de libération de Nelson Mandela qui a lutté, en Afrique du Sud, contre le régime de séparation raciale nommé Apartheid… Il semble qu’on ait encore beaucoup à apprendre de l’Histoire!

Le cycle de la peur sur le câble

Benjamin Franklin par Joseph Siffred Duplessis vers 1785

«Il existe un cycle de la peur. Lorsqu’un gouvernement dit qu’il sera sévère envers le crime, qu’il imposera des sentences minimales pour certains crimes et qu’il poursuit en général un ordre du jour touffu en matière de justice criminelle, cela alimente la peur.» C’est ce qu’explique Andrew Grenville dans Le Devoir ce matin, alors qu’on apprend par sondage interposé que 62 % des Canadiens – et 69 % des répondants au Québec – seraient favorables au rétablissement de la peine de mort. Donc la peur est stimulée par le discours de notre gouvernement. Mais pas seulement. Ça fait maintenant 18 mois que je suis câblée (avant, je me contentais des quatre chaînes et demi que me procuraient mes oreilles de lapin) et je suis toujours un peu sonnée par le répertoire offert. De Séries + à CBS, de Fox à V, seuls les noms des héros changent: Bones, NCIS, Criminal Minds, la Loi et l’ordre ou CSI et toutes leurs variantes,… c’est le même scénario. Une scène de crime, un coupable en liberté et des justiciers qui le démasquent pour le remettre aux mains de la loi. Non mais, est-ce qu’il y en a encore qui se souviennent du temps où les séries américaines populaires se déclinaient en des teintes variant entre Huit ça suffit et La Croisière s’amuse, pendant que les méchants bandits étaient poursuivis par les Anges de Charlie? En jetant un coup d’œil au Top-100 des séries les plus écoutées, je ne m’étonne guère de la culture de peur qui règne en ce moment. La peur de l’autre et de tous les dangers peut conduire une société à bien des excès. C’est dans cette peur que naissent des attitudes comme le racisme, le repli identitaire et l’intolérance. Sur elle qu’on s’appuie aussi pour renforcer la sécurité au détriment de la liberté, privilégier la santé plutôt que l’éducation, libéraliser les armes et contrôler la circulation des personnes. Dire que l’un des pères fondateurs de cet Empire de la peur aurait dit un jour:  «Un peuple prêt à sacrifier un peu de liberté pour un peu de sécurité ne mérite ni l’une ni l’autre, et finit par perdre les deux.» Si la peur est cyclique, à la télé comme dans la vie, je me demande bien quand on aura droit à une série captivante sur la vie et la pensée de  Benjamin Franklin

Loin des lentilles, près du coeur…

Jeunes filles du projet Thalita à Maceio, Brésil

Je viens de recevoir un courriel de mon amie Mariette Milot. Elle est partie depuis le 14 janvier en mission de solidarité au Brésil où elle entretient des liens missionnaires depuis de nombreuses années. Mariette a vécu et enseigné au Brésil. Ses liens avec les gens de ce pays sont à l’épreuve de la distance et du temps. Aujourd’hui à 75 ans, elle reste la personne la plus infatigable que je connaisse. Son enthousiasme dans la solidarité, sa foi en la capacité des personnes à changer les choses pour bâtir un monde meilleur inspirent l’action. Et comme les lentilles sont aujourd’hui braquées sur Haïti (non sans raison), je la laisse ici parler d’un autre coin du monde avec toute sa compassion (remarquez la composition du mot).

«Bom dia (bonjour) brésilien à chacune et chacun, amiEs solidaires de mon pays,

Me voici du lointain Brésil, après avoir vécu beaucoup d’événements déjà, tant avec mes groupes reliés au pays qu’avec moi-même. Je sors «presque en forme» d’une gastro-entérite qui m’a maltraitée durant 2 jours (..)  Je me sens déjà bien mieux. La chaleur ( 35 °C en continu), la fatigue et surtout les grandes émotions de mes visites chez les démuni-e-s  en étaient sûrement la cause .

La rencontre de ces gens pauvres, sans terre, sans toit, exposées à la traite humaine, opprimés par les grands de ce monde, et qui luttent sans cesse pour que justice leur soit faite, produit  en nous une admiration inconcevable et bien plus suscite une énergie que je qualifierais presque de « divine ». On sort de là « transfigurées » et remplies du désir « d’aller à leur suite »… Ne vous souvenez-vous pas de celui qui a dit « Venez à ma suite »… Il me semble que c’est cela le suivre: « aller à la suite de ces géantes et géants » qui sont train — presque sans moyens mais  le coeur ouvert — de révolutionner l’Humanité. Chaque fois que je vis quelques heures avec elles et eux, j’en ressors plus convaincue que jamais que la solidarité avec ces préférés de Dieu dont le « cœur au ventre » déplace toutes les montagnes du monde, est la solution au salut de ce même monde… et je suis si fière d’y participer, à leurs côtés.

Ces gens que j’ai vuEs faisaient partie:

1) De la communauté « Fleur du Bosquet », 35 familles de sans-terre qui viennent d’obtenir la possession de 35 lots pour y bâtir leur maison et cultiver quelques hectares de terre ; plusieurs personnes du Canada les ont aidés durant leur lutte de 10 ans à travers l’envoi de courriels aux députés, ministres, etc brésiliens, et autres…

2) Du projet « Thalita » pour les petites filles de la rue, en grand danger d’être happées par les maîtres de la prostitution; elles vous collent au cœur pour la vie !

3) De la communauté des Sans-Toit de la périphérie de Maceió, 423 familles qui ont failli voir les bulldozers détruire  leurs cabanes, mais qui, à force de lutte avec des groupes de partout, du Canada aussi, ont obtenu du gouvernement un terrain pour se bâtir… Mais que c’est terrible de voir leurs conditions actuelles. O.K. pour le terrain, mais la maison ? et la nourriture ? et les soins de santé ?  Celles et ceux qui verront mes photos n’en reviendront pas… Sauf qu’ils sont fortes et forts et ne lâcheront pas la corde !  Et nous serons là aussi…

Pour celles et ceux qui ont eu le courage de lire jusqu’ici, je vous dis que je commence demain une période de dix jours de traduction durant la rencontre de mes Sœurs de l’Assomption de la Sainte-Vierge du Brésil. Nous parlerons de tous ces groupes car leur engagement est bien là… Puis le 1er février,  je monterai au nord pour d’autres rencontres avec des communautés et avec mes chères anciennes et anciens élèves des années 1970.

Au milieu de tout ça, je porte tendrement au cœur, avec mes sœurs d’ici, l’immense et épouvantable souffrance de nos sœurs et frères de Haïti. Notre solidarité doit être à la mesure de leur douleur, et ce n’est pas peu dire ! N’oublions pas cependant que les Haïtiennes et Haïtiens sont forts aussi; ils connaissent déjà mieux que nous le courage et la foi….

Je vous dis au revoir et vous souhaite de vivre d’aussi belles expériences dans vos milieux respectifs. À la joie de vous revoir au début de février.

Mariette

P.S.: transmettez les nouvelles s.v.p.»

Règlement de comptes?

La publicité de l’émission «Enquête» en ondes depuis quelque temps me passe un peu en travers de la gorge. «À tous ceux qui n’ont rien à se reprocher, Enquête souhaite une bonne année 2010 (…)» Il ne s’agit pas de remettre en cause les allégations de corruption, pots-de-vin, magouilles, etc., évoquées dans la pub, diffusées par l’émission et évidemment crédibles compte tenu du professionnalisme des journalistes et des pratiques de la Société. Mais quand on sait que Tony Accurso poursuit Radio-Canada et le journaliste Alain Gravel pour diffamation en raison de ce reportage diffusé l’automne dernier (et qu’une autre poursuite s’est ajoutée en janvier), il me semble que ça sent le règlement de comptes. Que le service de publicité de Radio-Canada se mêle à ce petit jeu, ça me rend mal à l’aise. Surtout que l’histoire implique un journaliste qui n’a eu de cesse, en tant que président de la FPJQ tout comme dans son travail, de défendre l’intégrité, l’indépendance, la neutralité et la rigueur en journalisme. C’est pourquoi la petite phrase passe mal. Pour moi, c’est une petite encoche à l’idéal journalistique proposé par Radio-Canada et par ses journalistes, à commencer par Alain Gravel.